Pourquoi sépare-t-on le veau de sa mère en élevage laitier?

« Produire du lait de qualité, c’est mon métier ! Tout ce que je fais dans ma ferme, contribue à atteindre ce but : bien installer les vaches, soigner les veaux, … »

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Témoignage de Marie-Ghislaine Decoster

Agricultrice – élevage laitier, Jodoigne


Elevage laitier : séparation mère-veau

[Elevage #laitier] Séparation mère-veau, une pratique qui peut faire polémique, et qui pourtant a ses raisons.Marie-Ghislaine Decoster vous explique pourquoi !

Publiée par Collège des Producteurs sur Vendredi 22 février 2019

Parole d’éleveur

Pourquoi séparer le veau de sa mère ?

On entend souvent dire que les veaux sont malheureux. Mais, vous savez, les vaches laitières de races Holstein ne sont pas faites pour vivre avec leur petit, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, elles n’ont pas l’instinct maternel. Ensuite, par nature, elles produisent beaucoup de lait, beaucoup plus que ce que le veau a besoin. Si nous laissions le veau avec sa mère, il boirait trop de lait et aurait une diarrhée qui pourrait le conduire à la mort. La vache, quant à elle, n’évacuerait pas tout son lait de la mamelle. Cela peut provoquer une infection, la mammite, qui devra être soignée avec des antibiotiques et son lait ne sera plus commercialisable. Cette situation n’est bonne ni pour le bien-être du veau et de la vache, ni pour le revenu de l’éleveur.

Comment se passe l’élevage des veaux  ?

Dans ma ferme, le veau reste 24 heures avec sa mère afin de boire le premier lait (le colostrum) qui renforce son système immunitaire. Ensuite le veau est logé dans un box individuel pendant environ trois semaines puis en groupe dans de grands boxes. Le deux premiers jours, je lui donne le biberon et ensuite, je lui apprends à boire au seau. Les veaux reçoivent du lait des vaches de la ferme. Très vite, je mets à sa disposition des aliments solides afin qu’il développe son estomac de ruminant. Entre deux et trois mois, je diminue progressivement la quantité de lait et augmente la quantité d’aliments solides afin de le sevrer à trois mois. A ce moment-là, il arrive que le veau pleure après le lait pendant deux ou trois jours. C’est comme une enfant auquel on retire une sucrerie.

L’instinct de succion des veaux diminue avec l’âge, et grâce à l’évolution progressive de leur régime alimentaire, nous ne rencontrons presque jamais de souci avec des génisses qui veulent continuer à téter les mamelles de leurs congénères. Si vraiment c’est le cas, alors on les en dissuade, pour leur bien-être et celui des autres génisses, en plaçant un anneau dans le nez (comme un piercing mais qui ne transperce pas la paroi nasale). Celui-ci les empêche d’accéder à la mamelle des autres vaches.

L’élevage des veaux : beaucoup de présence et d’observation

L’élevage des veaux demande beaucoup d’observation. Pour que le veau reste en bonne santé, il faut être à l’affut du moindre changement de comportement. J’utilise des box individuel au début de sa vie parce que c’est plus facile pour surveiller chaque veau. Je peux également, les câliner et ils ont des contacts avec leurs voisins. Le moindre changement de comportement, d’attitude peut traduire un mal-être ou indiquer un début de maladie. Il ne faut prendre aucun risque avec la santé des jeunes veaux.

Le futur de la ferme !

Les veaux femelles constituent le futur de la ferme laitière. Par contre, les veaux mâles sont vendus au marchand entre 15 et 30 jours. Celui-ci les revend à un centre d’engraissement de veaux. Le prix d’un veau est de 50 à 65 euros, ce qui ne couvre pas les frais liés à l’élevage (insémination, bouclage, impression carte identification, alimentation, travail), surtout s’il a fallu soigner une diarrhée. Il n’y a pas moyen de faire autrement : engraisser des veaux, c’est un autre métier que la production laitière !